Accueil     Droit Commercial     Fusion : l’appel de l’absorbante s’étend à la condamnation de l’absorbée

Fusion : l’appel de l’absorbante s’étend à la condamnation de l’absorbée

Auteur : Noémie Le Bouard   Mise à jour :   Lecture : 2 minutes

Consulter cet expert du droit

Fusion : l’appel de la société absorbante couvre aussi la condamnation pénale de l’absorbée, sauf mention contraire.

  SOMMAIRE :

    Vous venez d’absorber une société dans le cadre d’une opération de fusion ? Attention : vous pourriez bien hériter non seulement de ses actifs, mais aussi… de sa condamnation pénale. Dans un arrêt du 29 avril 2025 (n° 24-81.555), la Cour de cassation rappelle que la société absorbante peut être tenue pour responsable pénalement de faits commis par la société absorbée.

    Et surtout : elle peut faire appel d’une condamnation qui ne la visait pas initialement, mais dont elle devient le prolongement. C’est un signal fort adressé aux dirigeants : en matière pénale, la fusion ne fait pas table rase.

    Fusion Appel Absorbante Condamnation

    1 - La fusion n’efface pas les risques pénaux : elle les transmet

    Lorsqu’une société en fusion est condamnée en première instance, sa disparition juridique ne fait pas disparaître le contentieux. En application de l’article L. 236-3 du code de commerce, la société absorbante reprend tous les droits et obligations de l’absorbée, y compris ceux liés à une procédure judiciaire en cours. Dans l’affaire jugée par la Cour de cassation :

    • Deux sociétés sont condamnées pour blessures involontaires après un accident du travail.
    • Quelques jours plus tard, elles fusionnent.
    • L’absorbante fait appel, sans mentionner de limitation.
    • La cour d’appel déclare l’appel irrecevable pour la société absorbée… à tort, selon la Cour de cassation.

    La Haute juridiction juge que l’appel de la société absorbante couvre aussi la condamnation de l’absorbée, sauf si le texte de l’appel en limite expressément la portée.

    2 - L’appel de la société absorbante vaut pour deux

    L’article 509 du code de procédure pénale précise que l’effet dévolutif de l’appel dépend du contenu de l’acte d’appel. Autrement dit, si l’appel ne précise rien, il s’applique à tout le jugement. Dans ce cas :

    • Même si la société absorbée n’existe plus juridiquement, la société absorbante peut contester les condamnations prononcées à son encontre.
    • Il n’est pas nécessaire que le ministère public ou la société absorbée fassent appel séparément.
    • L’appel unique suffit, à condition qu’il ne soit pas rédigé de manière restrictive.

    Cette décision consolide un principe déjà admis : la responsabilité pénale suit la transmission universelle de patrimoine.

    3 - Dirigeants : comment anticiper les risques en cas de fusion ?

    Cette jurisprudence impose de nouvelles précautions stratégiques pour les chefs d’entreprise et leurs conseils :

    • Avant toute fusion, exigez un audit contentieux complet, y compris en matière pénale.
    • Si une procédure est en cours, intégrez-la dans la documentation de fusion.
    • Si vous formez un appel post-fusion, soyez explicite sur la portée de votre recours.

    En cas de condamnation après renvoi, la peine ne pourra viser que la société absorbante, mais sera calculée en tenant compte des faits, des ressources et de la personnalité de l’absorbée au moment des faits. La fusion est un outil stratégique de croissance ou de restructuration.

    Mais elle est aussi un vecteur de transmission du risque pénal. En tant que dirigeant, vous ne pouvez plus ignorer que l’appel, tout comme la condamnation, peut vous suivre au-delà des frontières juridiques de la fusion. Un acte d’appel mal formulé, un contentieux ignoré ou sous-estimé, et c’est votre responsabilité – et celle de votre société – qui se retrouve engagée.

    LE BOUARD AVOCATS 4 place Hoche, 78000, Versailles   https://www.lebouard-avocats.fr/ https://www.avocats-lebouard.fr/