Introduction
En effet, il n’est pas rare de retrouver des polluants dans les ordures présentes dans ces dépôts, qui vont s’écouler et contaminer les sols. Si la réglementation des déchets et de leur dépôt n’est pas récente, elle s’est intensifiée au cours des dernières années face à un problème devenu de plus en plus contraignant, au regard de la hausse de la population, de sa consommation et par conséquent de sa production de déchets. Chaque année, en France, plusieurs dizaines de milliers de tonnes de déchets sont effectivement jetés en dehors de tout espace prévu à cet effet. Face à cela, l’Etat français a réagi et a adopté le 10 février 2020 la loi Anti-Gaspillage pour une Economie Circulaire (Loi AGEC), entrée en vigueur le 1er janvier 2022 et la loi « Climat et résilience» (Loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets) adoptée en août 2021.
Désormais, plusieurs mesures juridiques, revêtant diverses formes et destinées à s’appliquer à des stades différents, sont prévues pour endiguer ce phénomène. Avant de se pencher plus précisément sur ces moyens, il est nécessaire de définir ce que le droit entend par « déchet » et « dépôt sauvage ». L’article L. 541-1-1 du Code de l’environnement définit le déchet par : « toute substance ou tout objet, ou plus généralement tout bien meuble, dont le détenteur se défait ou dont il a l'intention ou l'obligation de se défaire ». Son « producteur » est la personne dont l’activité a produit ce déchet ou la personne qui effectue des opérations de traitement sur ce déchet, conduisant à un changement de sa nature ou de sa composition. Le détenteur du déchet est quant à lui la personne qui se trouve à l’instant T en possession dudit déchet. En revanche, il n’existe pas de définition légale du « dépôt sauvage ». Cette notion pourrait être malgré tout définie comme un lieu de dépôt, non autorisé au titre de la réglementation des installations classées, de déchets divers, par des personnes diverses, dans des lieux divers, qu’ils soient publics ou privés. Ce travail de définition est indispensable puisqu’il en découle un régime juridique, qui varie notamment selon la qualité et le rôle de la personne interpellée pour avoir participé à la formation d’un dépôt sauvage. L’article L. 541-2 du Code de l’environnement pose ainsi une obligation de gestion du déchet par son producteur et son détenteur jusqu’à son élimination ou sa valorisation, sous peine de l’engagement de leur responsabilité. Le troisième alinéa conclut en énonçant que le producteur ou le détenteur du déchet s’assure que « la personne à qui il les remet est autorisée à les prendre en charge », interdisant alors explicitement tout dépôt sauvage.
Les fondations de la lutte contre les dépôts sauvages de déchet existent donc mais ne sont pas à elles-seules suffisantes. Aussi, une réflexion à une échelle plus large et à une temporalité différente est nécessaire pour mettre au point des solutions efficaces et durables. Dans cette étude, les mesures destinées à s’appliquer postérieurement au dépôt illégal du déchet seront d’abord étudiées (I), conduisant ensuite à se pencher sur les mesures destinées à prévenir l’infraction, nécessaires pour combler les insuffisances de la lutte a posteriori (II).
1 - I. Les mesures juridiques s’appliquant postérieurement au dépôt illégal de déchets
La première mesure pour lutter contre les dépôts sauvages, et la plus évidente, est l’enlèvement du dépôt (A). Elle s’accompagne presque toujours de mesures répressives dès lors que les auteurs du dépôt sont identifiés (B).
A. L’évacuation des déchets
Si la mesure d’évacuation des déchets jetés hors de toute zone prévue à cet effet vers les structures adéquates paraît évidente pour lutter contre les dépôts sauvages, sa mise en œuvre n’est cependant pas chose aisée. En effet, si l’évacuation des déchets est la solution la plus directe pour mettre fin à un dépôt sauvage déjà constitué, il n’est pas rare de voir des amas de déchets dans des zones non réglementées demeurer ainsi pendant plusieurs mois voire plusieurs années. Le législateur a donc adopté des textes permettant une évacuation rapide des déchets constitutifs de ces dépôts sauvages. La première mesure est la définition d’une autorité compétente pour procéder à l’élimination des dépôts. Cette autorité n’est autre que le maire qui dispose de la police spéciale des déchets en vertu de la décision « commune de Merfy » rendue par le Conseil d’Etat en 1977 CE, 28 oct. 1977, Commune de Merfy, req. n° 95537 01493, lui permettant de prendre à l’égard du producteur ou du détenteur de déchets abandonnés, déposés ou gérés dans des conditions présentant des dangers pour l’homme ou l’environnement, les mesures nécessaires pour en assurer l’élimination (mesures détaillées aujourd’hui à l’article L. 541-3 du Code de l’environnement). Cette compétence est déterminée par la loi à l’article L. 2212-2 du Code général des collectivités territoriales (CGCT) qui dispose en son paragraphe premier que la police municipale comprend tout ce qui intéresse la « commodité du passage dans les rues », ce qui comprend « l’enlèvement des encombrements » et la répression « des dépôts, déversements, déjections et projection de toute matière ou objet de nature à nuire » à cette commodité du passage ou à la propreté des rues. C
e pouvoir appartient au président de l’établissement public de coopération intercommunal concerné lorsque le maire le lui a transféré, en vertu de l’article L. 5211-9-2 du CGCT. Face à un dépôt sauvage, l’autorité communale titulaire de la police administrative peut donc agir ; cela va même plus loin puisqu’elle est dans l’obligation de mettre fin au trouble qui menace l’ordre public. Aussi, dès lors qu’une personne identifie un dépôt sauvage, elle a tout intérêt à le signaler à la mairie compétente afin qu’elle procède ou fasse procéder (par le ou les responsables du dépôt après leur mise en demeure) à l’évacuation et/ou à l’élimination des déchets. Dans ce cas, si le maire n’agit pas, il commet une faute lourde susceptible d’engager la responsabilité de la commune. Par cela, le législateur s’assure que des mesures seront prises afin de lutter contre ces dépôts illégaux de déchets. Cette attribution de principe du maire en la matière s’arrête toutefois là où commence celle du préfet, titulaire de la police des installations classées, et de manière plus générale, de la police de l’environnement. En effet, lorsque les déchets abandonnés se trouvent sur le site d’une installation classée pour la protection de l’environnement (ICPE), quelle qu’elle soit, c’est au préfet, via les services des directions régionales de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement (DREAL), de prendre les mesures adéquates. De plus, le préfet peut faire procéder à l’évacuation et à l’élimination des déchets lorsque le maire est défaillant dans l’exercice de ses pouvoirs de police spéciale précités, comme cela a été rappelé par le Conseil d’Etat en 2011 (CE, 23 nov. 2011, req. n° 325334), sur le fondement de l’article L. 2215-1 du CGCT. Le législateur et le juge se sont donc assurés d’une élimination des dépôts sauvages en toute circonstance, en superposant les autorités capables d’agir en la matière et en sanctionnant l’inaction de ces dernières. Malgré tout un problème demeure, touchant principalement les communes de tailles modestes, le coût et les moyens matériels pour évacuer les déchets des dépôts sauvages vers des centres réglementés.
Encore une fois, le législateur est intervenu, mettant en œuvre le droit de l’Union européenne (et plus précisément la directive 2008/98/UE) en créant l’article L. 541-10 du Code de l’environnement, posant le principe de responsabilité élargie du producteur (REP) permettant de faire « obligation à toute personne physique ou morale qui élabore, fabrique, manipule, traite, vend ou importe des produits générateurs de déchets ou des éléments et matériaux entrant dans leur fabrication, dite producteur au sens de la présente sous-section, de pourvoir ou de contribuer à la prévention et à la gestion des déchets qui en proviennent ainsi que d’adopter une démarche d’écoconception des produits », passant notamment par la création d’éco-organismes par les acteurs de la filière. A ce titre, la ministre de l’écologie, Barbara Pompili, a précisé que « La majorité du coût de nettoyage des dépôts sauvages sera prise en charge par les filières REP, au prorata des déchets présents dans les dépôts, dans l’objectif de soulager les collectivités et transférer le coût du nettoyage vers les filières et non plus vers les contribuables » (Ministère de la Transition écologique, « Lutte contre les dépôts sauvages : de nouvelles avancées », dépots sauvages décharges | Ministère de la Transition écologique (ecologie.gouv.fr), 21/07/2020). L’élimination des dépôts sauvage par l’évacuation des déchets est donc une des « mesures nécessaires au respect de réglementation » posé par l’article L. 541-3 précité, comme l’est également la sanction de l’auteur du dépôt sauvage.
B. La sanction des contrevenants
Il existe deux actions différentes pour sanctionner le ou les responsables d’un dépôt illégal de déchet. La première est une procédure administrative qui tient principalement à faire procéder à l’enlèvement du dépôt sauvage, comme évoqué plus tôt. La deuxième est quant à elle inscrite dans une logique de répression et relève donc d’une procédure pénale. La phase administrative débute, en application de l’article L. 541-3 du Code de l’environnement, par une phase de conciliation tenant à l’information du contrevenant « des faits qui lui sont reprochés et des sanctions qu’il encourt » par le biais d’une lettre recommandée, lui permettant alors d’adresser ses observations en réponse, dans un délai d’un mois. Le maire peut également, dans le cadre de cette procédure administrative, le mettre en demeure d’effectuer les opérations nécessaires à l’évacuation des déchets dans un délai déterminé. L’article L. 541-3 dispose ensuite qu’au terme de cette procédure, si le destinataire de la mise en demeure n’a pas obtempéré dans les délais indiqués, le maire (ou le préfet en cas de défaillance du maire), peut, par une décision motivée susceptible de recours :
- « 1° L’obliger à consigner une somme correspondant au montant des mesures prescrites.
- 2° Faire procéder d’office, en lieu et place de la personne mise en demeure et à ses frais, à l’exécution des mesures prescrites.
- 3° Suspendre le fonctionnement des installations et ouvrages, la réalisation des travaux et des opérations, ou l’exercice des activités qui sont à l’origine des infractions constatées jusqu’à l’exécution complète des mesures imposées et prendre les mesures conservatoires nécessaires, aux frais de la personne mise en demeure.
- 4° Ordonner le versement d’une astreinte journalière au plus égale à 1 500 €.
- 5° Ordonner le paiement d’une amende au plus égale à 150 000 € ».
Indépendamment de cette action administrative, des actions pénales sont également possibles. L’article R. 632-1 du Code pénal vient ainsi réprimer les dépôts ou abandons d’ordures ou d’objets, en lieu public ou privé par une amende de 2ème classe d’un montant maximal de 150 euros. L’article R. 635-8 vient pour sa part sanctionner les dépôts ou abandons d’ordures ou d’objet transportés à l’aide d’un véhicule dans un lieu non autorisé par une amende de 5ème classe d’un montant de 1500 euros (portée à 3000 euros en cas de récidive) et la confiscation du véhicule. L’article R. 644-2 du Code pénal sanctionne également tout dépôts ou abandons d’objets quelconques sans nécessité, embarrassant la voie publique et entravant ou diminuant la liberté ou la sûreté de passage, par une amende de 4ème classe d’un montant maximal de 750 euros et par la confiscation de la chose ayant servi à commettre infraction.
Cette infraction devient même, au titre de l’article L. 541-46 du Code de l’environnement, un délit puni d’une amende de 75 000 euros d’amende (multiplié par cinq pour les personnes morales) et deux ans de prison pour le dépôt illégal par un professionnel de déchets d’entreprises qui auraient dû être remis dans des installations de traitement de déchets (Ministère de la Transition écologique, « Guide relatif à la lutte contre les abandons et dépôts illégaux de déchets », déc. 2020, p. 10). Enfin, tout manquement aux obligations édictées par un décret ou arrêté de police est sanctionné d’une amende de 38 euros. La loi AGEC, applicable dès janvier 2022, est venue de surcroît renforcer les sanctions applicables aux auteurs de dépôts sauvages. Désormais, lors d’un dépôt sauvage, les délinquants se verront sanctionner d’une amende immédiate de 15 000 euros d’amende (et l’immobilisation de leur véhicule) comme en dispose l’article L. 541-3 récemment mis à jour. Ce renforcement des sanctions se traduit par une volonté du législateur et du gouvernement de lutter également contre les dépôts sauvages par le biais de la dissuasion. Pour autant, cela n’est absolument pas suffisant, notamment au regard des difficultés d’identifications des auteurs de ces infractions. Par conséquent, cette lutte a posteriori de la constitution des dépôts sauvages doit nécessairement s’accompagner de lutte en amont de cette formation.
2 - II. Un combat s’effectuant également en amont de la formation des dépôts sauvages
Cette lutte a priori passe tout d’abord par la prévention des dépôts sauvages (A) mais va encore plus loin puisqu’elle suppose aussi l’évitement de la formation du déchet (B).
A. La prévention des dépôts sauvages
« La saleté attire la saleté ». Cette expression, illustration de la théorie de la vitre brisée, explique, au moins pour partie, le rôle déterminant de la prévention dans la lutte contre les dépôts sauvages. En effet, les dépôts sauvages se sont constitués, pour la plupart, par des abandons de déchets multiples et isolés. Aussi, le meilleur moyen pour empêcher la constitution de dépôts, voire de décharges sauvages, est d’éviter tout début de regroupement de déchets en un même point, en intervenant le plus rapidement possible (cf partie I. A) mais aussi en proposant plusieurs alternatives, légales et propres, à l’abandon de déchets. L’idée est donc de prévenir toute apparition de dépôt sauvage, et cela passe d’abord par une identification des déchets présents dans ces derniers, afin d’agir à la source. C’est chose faite puisque le ministère de la Transition Ecologique affirme que les déchets du bâtiment représentent la majeure partie des déchets présents dans les dépôts sauvages (site du ministère de la transition écologique précité). En effet, en 2014, les entreprises du bâtiment et des travaux publics ont produit 227,5 millions de tonnes de déchets, dont 80 % sont des déchets inertes issus de travaux publics et une part conséquente de ces derniers n’est ni revalorisée ni éliminée. Ces déchets inertes, s’ils ne sont bien souvent pas dangereux pour l’environnement ou la santé humaine, ne sont pas recyclables et difficilement éliminables, ce qui explique leur forte présence dans les dépôts sauvages. Dès lors que les déchets de chantier ont été identifiés comme une des causes du problème, il s’agit d’agir sur ce secteur afin de prévenir leur présence dans ces dépôts. L’une des principales solutions serait de faciliter l’accès aux décharges réglementées et d’augmenter le nombre de points de collecte pour ces déchets. Mais encore une fois, les coûts sont élevés. Par conséquent, il faut revenir à la solution évoquée plus tôt, à savoir répartir la charge de la gestion des déchets en faisant peser ce coût sur les producteurs des produits qui en sont à l’origine. Cela passe donc par la mise en place d’une filière REP sur les produits ou matériaux de construction du bâtiment (non couverts par une autre filière REP), créée justement par la loi AGEC en 2020 et mise en œuvre en janvier 2022. Les entreprises mettant sur le marché des produits et matériaux de construction du secteur du bâtiment devront donc obligatoirement adhérer à l’éco-organisme « VALOBAT », nouvellement créé, qui financera en théorie, par le biais de ses adhérents, toute action de recyclage, valorisation et collecte de déchets issus du bâtiment.
A titre d’exemple, il pourra financer les bacs de tri de déchets présents dans les chantiers, ainsi que leur ramassage et leur dépôt dans les décharges réglementées et dans les centres de revalorisation ou de recyclage. Au-delà des filières REP, et toujours dans une démarche de prévention de la formation de dépôts et décharges sauvages, la loi AGEC oblige les maîtres d’ouvrage à réaliser un diagnostic des déchets issus des travaux (introduit dans le Code de la construction et de l’habilitation à l’article L. 111-10-4), et pose une obligation de faire figurer au sein des devis les informations relatives à la gestion des déchets produits par les travaux (aujourd’hui présente à l’article D. 541-45-1 du Code de l’environnement).
Le diagnostic comprend notamment des orientations visant à assurer la traçabilité de ces déchets, et précise, en cas d’impossibilité de réemploi ou de valorisation, les modalités d’élimination des déchets (J-P BUS et C. MORALES FRENOY, « l’économie circulaire au secours de la planète : le cas des déchets de chantier », RDI, 2021. 456). On comprend donc bien que le législateur cherche d’une part à prévenir l’abandon illégal des déchets de travaux en informant le maître d’ouvrage sur les moyens légaux pour les jeter, et d’autre part à assurer une identification rapide desdits déchets (via leur traçabilité) si le maître d’ouvrage ne se conforme pas au diagnostic. Ce travail d’identification rapide des lieux de formation/présence de dépôts sauvages ne s’arrête pas là puisqu’un outil innovant a été mis à disposition des collectivités d’Ile-de-France afin de signaler ces dépôts. La Société d’aménagement foncier et d’établissement rural (Safer) d’Ile-de-France a en effet mis en place la plateforme Vigimitage, permettant de signaler numériquement sur une carte tout dépôt sauvage (à l’origine dans un but de lutte contre le mitage urbain). Cela permet alors aux services des collectivités concernées d’intervenir rapidement sur les lieux indiqués et d’évacuer les déchets, voire d’appréhender les responsables. La prévention des dépôts est donc au centre de la politique de lutte contre les dépôts sauvages, mais elle s’inscrit dans une politique plus englobante, et encore plus en amont de la formation du dépôt, consistant à prévenir la production même du déchet.
B. La prévention de la production des déchets constitutifs des dépôts sauvages
Qu’y a-t-il de plus efficace pour lutter contre les dépôts sauvages que de supprimer les éléments qui les constituent, à savoir les déchets ? Rien, pourrait-on affirmer avec certitude. D’ailleurs, c’est ce qu’entreprend la France depuis plusieurs années pour faire face à une augmentation continue de la production de déchet. Si une suppression des déchets est évidemment impossible, une réduction l’est en revanche beaucoup plus, et le gouvernement et le législateur semblent l’avoir compris. La loi AGEC de 2020 et la loi « Climat et Résilience » de 2021 en sont les dernières illustrations. La première mesure pour éviter la production de déchet est d’abord l’interdiction des éléments à usage unique et à durée de vie limitée. En ce sens, la loi AGEC interdit toute utilisation de vaisselles jetables dans les restaurants de « fast-food ». La loi « Climat et Résilience » comporte quant à elle plusieurs dispositions tendant à interdire l’utilisation d’emballages plastiques (pour certains fruits et légumes notamment), sinon de la limiter, par l’usage de pénalités. Toutefois, les interdictions n’auront une réelle efficacité dans la lutte contre les dépôts sauvages que si elles s’accompagnent de solutions alternatives. Dans le cas contraire, elles ne seront pas respectées. Aussi, le droit actuel pousse à favoriser le réemploi, afin d’éviter que des produits qui pourraient avoir encore une utilité soient jetés et deviennent des déchets, susceptibles de se retrouver dans les dépôts illégaux.
La loi AGEC a, en ce sens, introduit un article L. 541-10-24 dans le Code de l’environnement qui contraint toute personne mettant sur le marché national des bouteilles de gaz pour usage individuel à assortir ces dernières d’une consigne ou d’un système équivalent favorisant leur réemploi, et à offrir un système de reprise gratuite des bouteilles de gaz dont le détenteur s’est défait hors desdits circuits de consigne, « y compris lorsque ces déchets sont collectés par les collectivités compétentes lors du nettoyage de dépôts sauvages ». De plus, pour revenir aux déchets de chantier, constituant pour rappel une part majeure des déchets présents dans les dépôts sauvages, la loi AGEC favorise le réemploi de ces déchets en énonçant que les déchets de chantier destinés au réemploi ne pourront plus prendre le statut juridique de déchet (disposition que l’on retrouve désormais à l’article L. 541-4-4 du Code de l’environnement). Toujours dans un but incitatif, la loi du 10 février 2020 a modifié l’article L. 228-4 du Code de l’environnement prévoyant désormais que dans le domaine de la construction ou de la rénovation, la commande publique « veille au recours à des matériaux de réemploi », ce qui ne manquera évidemment pas d’être pris en compte par les acteurs du marché. Des obligations de réparabilité vont également être mises en place pour compléter lutter contre l’obsolescence programmée et par conséquent limiter le nombre de produits susceptibles de se retrouver dans les dépôts et décharges sauvages.
La loi AGEC impose ainsi au 1er janvier 2022 que les fabricants et importateurs d’appareils électroménagers (secteur le plus touché par l’obsolescence programmée), de petits équipements informatiques et de télécommunications, d’écrans et de moniteurs, assurent la disponibilité de pièces détachées pendant une période minimale de cinq ans à compter de la mise sur le marché. Il en est de même pour le matériel médical. La loi « Climat et Résilience » a quant à elle étendu cette obligation à d’autres secteurs, tels que celui des engins de déplacement personnel motorisés. Pour que cette obligation soit effective, la loi AGEC l’a complétée par l’instauration d’un fond de réparation pour financer les opérations de réparation. Toutefois, cette mise en place, prévue pour début 2022, a été reportée par le gouvernement sans explication, ce que l’on peut regretter. Il l’a également complétée avec l’établissement des filières REP. En effet, dès lors que le producteur subit les conséquences financières de la gestion des biens qu’il produit lorsqu’ils revêtent le statut de déchet, il a tout intérêt à mettre sur le marché des produits plus durables et dont l’élimination est aisée. Enfin, le législateur cherche depuis maintenant plusieurs années à développer le recyclage pour réduire la quantité de déchet, tout en conservant une consommation stable. A ce titre, la loi AGEC pose un objectif de 100 % de plastique recyclé d’ici le 1er janvier 2025. Toutes ces méthodes permettent une réduction des déchets et donc en toute logique des dépôts sauvages, dont la « matière première » se fera plus rare.
3 - Conclusion
En conclusion, il est possible d’affirmer que la lutte contre les dépôts sauvages n’a une chance d’aboutir que par la combinaison de plusieurs méthodes, incitatives comme répressives, en amont comme en aval, et par les efforts de tous les acteurs, à savoir l’Etat, les entreprises, les particuliers et les collectivités. Le gouvernement a choisi la méthode de la « Responsabilité élargie du producteur » comme fer de lance de cette lutte mais il faut rappeler que si en théorie, ce mécanisme parait efficace, il ne l’est en pratique que si le gouvernement s’assure de son effectivité, ce qui n’est pour l’instant pas le cas.