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L’employeur peut-il demander un casier judiciaire pendant recrutement

Auteur : Noémie Le Bouard   Mise à jour :   Lecture : 3 minutes

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Quelles sont les obligations légales encadrant la demande de casier judiciaire par un employeur et les droits des salariés face à cette exigence.

  SOMMAIRE :

    La demande d’un casier judiciaire par un employeur est une question qui soulève des enjeux juridiques majeurs. Elle implique un équilibre entre les droits des salariés, notamment le respect de leur vie privée, et l’intérêt légitime des employeurs à évaluer la probité des candidats ou des employés en poste. Si cette pratique est autorisée dans certains cas spécifiques, elle est encadrée par des règles strictes fixées par le Code du travail, le Code civil, et les recommandations de la CNIL.

    Dans cet article, nous analysons les situations dans lesquelles un employeur peut légitimement demander un bulletin n°3, les protections dont disposent les salariés face à une demande abusive, ainsi que les recours disponibles en cas de litige.

    1 - Le cadre légal encadrant la demande d’un casier judiciaire

    Ce que dit le droit

    L’article L1221-6 du Code du travail impose que les informations demandées à un salarié ou à un candidat soient strictement nécessaires pour évaluer son aptitude à occuper le poste concerné. Cette règle vise à éviter toute atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée, protégé par l’article 9 du Code civil.

    En pratique, l’employeur ne peut demander qu’un bulletin n°3 du casier judiciaire, qui est accessible uniquement à la personne concernée. Ce document contient les condamnations pénales les plus graves, comme les peines de prison sans sursis et les interdictions d’exercer certaines professions. Il exclut toutefois les infractions mineures ou réhabilitées, garantissant ainsi un équilibre entre sécurité et droit à la réinsertion.

    Les bulletins n°1 et n°2, plus complets, sont réservés respectivement aux autorités judiciaires et aux administrations habilitées. Toute tentative de l’employeur d’accéder à ces documents constitue une infraction passible de sanctions pénales.

    Les emplois où le casier judiciaire est requis

    Certains secteurs nécessitent une vérification systématique du casier judiciaire, notamment pour des raisons de sécurité ou de confiance. Parmi ces professions figurent :

    • Les métiers de la sécurité (agents de sécurité, policiers, gendarmes).
    • Les fonctions impliquant un contact avec des mineurs (enseignants, éducateurs, assistants maternels).
    • Les postes de gestion financière ou de manipulation de fonds (comptables, trésoriers).

    Dans ces cas, la demande de casier judiciaire est considérée comme légitime, à condition de respecter les règles de confidentialité et de proportionnalité.

    2 - Les droits des salariés et les obligations des employeurs

    Refuser une demande abusive

    Un salarié ou un candidat peut légitimement refuser de fournir un casier judiciaire si la demande de l’employeur n’est pas justifiée par la nature des fonctions.

    L’article L1132-1 du Code du travail interdit toute discrimination fondée sur des critères non pertinents pour l’emploi. Ainsi, un refus motivé par une demande abusive ne peut justifier un rejet de candidature ou une sanction.

    Cependant, dans les professions où la présentation d’un bulletin n°3 est obligatoire, un refus peut entraîner l’exclusion légitime du processus de recrutement. Cette exigence doit néanmoins être clairement énoncée dès l’offre d’emploi.

    Confidentialité et conservation des données

    Lorsqu’un employeur consulte un bulletin n°3, il est tenu par des obligations strictes en matière de confidentialité. Conformément au RGPD et aux recommandations de la CNIL, l’extrait ne peut être conservé qu’aussi longtemps que nécessaire pour remplir la finalité de la demande.

    Toute conservation abusive expose l’employeur à des sanctions administratives et pénales. En cas de manquement, l’article 226-21 du Code pénal prévoit des peines pouvant aller jusqu’à cinq ans d’emprisonnement et 300 000 euros d’amende.

    3 - Recours en cas de litige

    Recours administratifs et judiciaires

    Les salariés disposent de plusieurs recours en cas de demande abusive ou de non-respect des règles de confidentialité. La CNIL peut être saisie pour enquêter sur un éventuel manquement au RGPD et imposer des sanctions à l’employeur, telles que des amendes pouvant atteindre 20 millions d’euros ou 4 % du chiffre d’affaires annuel mondial. Sur le plan judiciaire, les salariés peuvent saisir le conseil de prud’hommes pour discrimination ou pratique abusive.

    En cas de détournement des informations issues du casier judiciaire, une plainte pénale peut également être déposée.

    L’importance d’un accompagnement juridique

    Les questions liées au casier judiciaire dans le cadre professionnel peuvent rapidement devenir complexes. Faire appel à un avocat spécialisé en droit du travail permet de sécuriser ses démarches, qu’il s’agisse de conseiller un employeur ou de défendre un salarié.

    4 - Conclusion

    La demande d’un casier judiciaire par un employeur, bien qu’autorisée dans certains cas spécifiques, est soumise à un encadrement strict. Elle doit respecter le principe de proportionnalité, garantir la confidentialité des données collectées et s’inscrire dans un cadre légal précis.

    Pour éviter tout litige ou sanction, il est essentiel que salariés et employeurs connaissent leurs droits et obligations. En cas de doute, consulter un avocat spécialisé constitue une démarche prudente et efficace pour sécuriser les relations de travail et préserver les droits fondamentaux de chacun.

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