1 - Les avantages de dépôt d’une marque au niveau national
Si vous souhaitez protéger votre marque de la façon la plus efficace possible, prenez les choses pas à pas : votre premier objectif sera d'acquérir la protection nationale de votre marque et ce, tout d’abord pour 3 raisons pratiques :
- La procédure d'enregistrement est rapide (elle devient en moyenne effective cinq mois à compter du dépôt s'il n'y a pas d'opposition, ou douze mois dans le cas contraire) ;
- Votre investissement est limité : en France, il est de 190 € pour trois classes de produits et services, si le dépôt a été effectué en ligne, puis 40 € pour chaque classe de produits ou services supplémentaire ;
- La procédure en ligne est simplifiée : Depuis 2017, le site de l’INPI permet d’effectuer les procédures de façon dématérialisée. Il est néanmoins vivement conseillé d’effectuer des recherches d'antériorité et de contacter un spécialiste avant cela.
Ensuite, même si vous voyez les choses en grand et envisagez de déposer votre marque à l’international, il est tout de même conseillé de commencer par un dépôt national :
- Votre dépôt national peut servir de "test", si vous souhaitez étendre la protection au niveau international. En effet l'INPI peut refuser votre marque au motif que les conditions de protection ne sont pas remplies ou s'il existe une marque antérieure opposée à l'enregistrement ;
- Le dépôt ouvre un "délai de priorité" : pendant six mois, vos dépôts nationaux à l’étranger seront protégés.
- Un dépôt national sera de toute façon exigé si vous souhaitez par la suite étendre les effets de votre enregistrement à d'autres pays par le biais d’un dépôt international (dit Protocole de Madrid, voir ci-dessous).

2 - La procédure de dépôt d’une marque en France
A/ Un enregistrement totalement dématérialisé
Depuis le 16 octobre 2017, l'enregistrement des marques en France ne se fait plus que par voie électronique sur le site de l'INPI. La publication de votre demande de marque interviendra dans un délai de six semaines au Bulletin des marques, puis l'INPI procèdera à l'examen des formalités (classification etc.) et des motifs absolus de refus (validité de la marque). L’examen d'office des motifs absolus de refus étant systématique, il est fortement conseillé de les connaître avant d'effectuer votre demande, cela évitera les erreurs courantes et vous fera gagner du temps.
En cas de refus préliminaire, n'hésitez pas à déposer des observations et à tenter de surmonter les motifs absolus de refus en prouvant l'acquisition du caractère distinctif par l'usage. La décision de refus est susceptible d'un recours devant l'une des dix cours d'appel compétentes (déterminée par le lieu de votre domicile) dans un délai d'un mois à compter de la notification (CPI, art. R. 411-21).
Enfin, si vous avez déposé une demande de marque à l'étranger dans les six mois précédant votre dépôt français, n'oubliez pas de revendiquer la priorité de votre dépôt étranger (CPI, art. L. 712-12).
B/ Le risque d’opposition d’une marque antérieure
Parallèlement à l'examen de vos demandes de marque par l'INPI, la publication de celle-ci ouvre une période de deux mois durant laquelle la marque peut faire l'objet d'une opposition. L'opposition est une procédure qui permet au propriétaire d'une marque antérieure de s'opposer à l'enregistrement de votre demande de marque, s'il estime que celle-ci porte atteinte à ses droits. Cela peut arriver si :
- La marque antérieure est une marque de renommée et que l'usage de votre demande de marque serait de nature à diluer cette renommée ou à en tirer un avantage indu (CPI, art. L. 713-5).
- Il existe un risque de confusion dans l'esprit du public quant à l'origine commerciale des marques (CPI, art. L. 713-2 à L. 713-4), du fait de l'identité et/ou similitude des signes et des produits ou services.
Pensez donc bien à réaliser une recherche d'antériorité avant de déposer votre marque. Si la marque antérieure opposée à votre demande de marque a été enregistrée plus de cinq années avant la publication de cette dernière, vous pouvez exiger de l'opposant qu'il apporte des preuves de l'usage sérieux de sa marque en France. À défaut, l'opposition est rejetée. Cette période d’opposition n’est accessible qu’aux marques déposées, les autres signes distinctifs (dénominations sociales, noms commerciaux et enseignes) ne peuvent être invoqués que dans le cadre de procédures judiciaires en contrefaçon (CPI, art. L. 711-4). Par ailleurs, le fait qu'un tiers titulaire de marques antérieures n'ait pas formé opposition à l'enregistrement de votre demande de marque n'est en soi pas un obstacle à l'introduction ultérieure d'une action judiciaire en contrefaçon.
Pour maintenir vos droits sur une marque, il est nécessaire que vous l'exploitiez dans les cinq années qui suivent son dépôt. A défaut, vous pourriez faire l’objet d’une procédure en déchéance de marque.
3 - La procédure de dépôt d’une marque de l’Union européenne
A/ Les avantages et désavantages du dépôt européen
Vous pouvez envisager un dépôt d’une marque de l’Union européenne auprès de l’Office de l'Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) pour une protection dans l'ensemble de l'UE. La marque de l’UE permet l'enregistrement d'une marque produisant des effets uniformes sur l'ensemble du marché commun (27 États membres de l’Union européenne). Le français faisant partie des cinq langues de travail de l'EUIPO (au côté de l’allemand, l’anglais, l’espagnol et l’italien), vous pouvez déposer votre marque sans avoir besoin de réaliser de copies traduites. Les principaux avantages du dépôt européen sont :
- Une procédure d'examen centralisée et simplifiée. Les procédures d'opposition (des potentiels détenteurs antérieurs d’une marque similaire) sont également centralisées.
- Le coût de la protection qui reste limité par rapport au coût de multiples dépôts nationaux : le dépôt s'accompagne d'une taxe de base unique d'un montant de 850 € (dépôt électronique) pour les marques individuelles, à laquelle s'ajoute une taxe de 50 € pour la deuxième classe de produits et services et de 150 € pour toute classe additionnelle au-delà de la deuxième.
- La marque de l’Union européenne est un titre unique. Vous pouvez donc simplifier la gestion de votre portefeuille de marques.
- L'obligation d'utiliser la marque est plus souple qu’au niveau national : il est généralement admis que la marque de l’UE ne nécessite pas un usage dans chacun des États membres.
Concernant les désavantages d’un tel dépôt :
- Procédure plus complexe : la procédure de dépôt d'une marque européenne est plus complexe que celle d'un dépôt national.
- Possibilité de refus d’enregistrement plus élevé : une marque européenne peut être refusée si elle n'est pas considérée comme distinctive ou si elle est trop similaire à des marques existantes.
B/ Les motifs de refus du dépôt d’une marque de l’UE
Attention, après l'examen de la recevabilité de votre demande, l'EUIPO vérifie si des motifs absolus de refus existent. Il suffit qu’une seule partie de l'Union européenne présente ces motifs pour que votre demande soit refusée. Si aucun motif absolu de refus n'a été soulevé ou bien si un tel motif a été surmonté, la demande de marque est publiée. Dans le délai de trois mois à compter de la publication de la demande, les tiers titulaires de droits antérieurs peuvent former opposition à l'enregistrement, en vous opposant leurs droits antérieurs sur une marque similaire.
Il est à noter que les droits antérieurs des opposants peuvent être aussi bien des marques enregistrées que « d'autres signes utilisés dans la vie des affaires dont la portée n'est pas seulement locale ». Cela concerne par exemple des dénominations sociales, les noms commerciaux ou encore des appellations d'origine. Une fois enregistrée, la marque est valable pendant 5 ans et peut être renouvelée indéfiniment, pour une période de 5 ans à chaque fois. L'EUIPO peut néanmoins annuler ou déclarer déchue une marque si elle ne remplit plus les conditions d'enregistrement ou si son utilisation est illicite, ou encore si elle n'a pas été utilisée sérieusement pendant cinq années consécutives. Les titulaires de marques peuvent également décider de retirer volontairement leur marque de l'enregistrement.
Vous ne pouvez céder la marque de l’Union européenne que pour l'intégralité du territoire de l'Union. Vous pouvez néanmoins donner une licence d’exploitation pour tout ou partie de ce territoire.
4 - La procédure d'enregistrement d'une marque à l'international
A/ Avantages et inconvénients du dépôt international
La France fait partie d'un système d'enregistrement international, le Protocole de Madrid. Le principe essentiel de ce système est qu'une "marque de base" déposée ou enregistrée dans un pays d'origine peut être étendue dans plusieurs pays étrangers où la marque sera soumise aux mêmes obligations et produira les mêmes effets qu'un enregistrement national. Le système d'enregistrement international présente les avantages suivants :
- Moindres coûts par rapport à des dépôts nationaux ;
- Une couverture territoriale étendue et hors d'Europe ;
- La possibilité d'un choix des pays où vous avez un réel intérêt à protéger (contrairement au dépôt auprès de l’UE, qui se fera auprès des 27 Etats).
Ce système présente également deux désavantages pouvant être handicapant, en fonction de votre stratégie :
- La complexité du Protocole, qui vous obligera à prendre un expert en la matière
- Dépendance à la marque de base. Son invalidité dans les cinq années suivant l'enregistrement international a pour effet d'invalider l'ensemble des marques issues de cet enregistrement international.
B/ La mise en œuvre du dépôt international
Pour mettre en œuvre la demande internationale, il faut que le signe de la marque concernée soit le même que celui protégé dans le pays d'origine, et qu'il désigne la même liste de produits ou services (ou une liste plus restreinte). Vous devrez remplir le formulaire de demande MM2, présentable en français, anglais ou espagnol et que vous devez envoyer à l'INPI (si vous avez déposé votre "marque de base" en France). L'INPI transmet ensuite votre demande à l'OMPI, qui communiquera ensuite directement avec vous ou votre mandataire. La demande doit indiquer les États pour lesquels vous demandez une protection. Il est possible de désigner ultérieurement d'autres États parties au Protocole.
Après une vérification de forme, l'enregistrement sera inscrit sur le registre international, publié et notifié aux administrations nationales des pays désignés. L'enregistrement international produira, à compter de la date d'enregistrement, les mêmes effets qu'une demande nationale (ou communautaire si l'Union européenne est désignée) dans chaque pays désigné. Il sera examiné comme une demande nationale par chaque office des marques des pays désignés. Dans les pays prévoyant une procédure d'opposition, l'enregistrement international peut faire l'objet d'une opposition comme une demande de marque nationale. La durée maximale d'examen des motifs absolus de refus est fixée à 12 mois (Arrangement de Madrid) ou 18 mois (Protocole de Madrid).
Si vous comptez protéger votre marque au niveau européen ou international, il vous est vivement conseillé de prendre contact avec un professionnel en Droit des marques.